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Contrôle et contentieux

Des limites au principe de non-renouvellement des vérifications de comptabilité en matière de TVA

L'interprétation des exceptions au principe de non-renouvellement des vérifications de comptabilité en matière de TVA : la Cour adopte une lecture favorable à l'administration en considérant que l'exception prévue à l'article L. 176 du LPF permet une nouvelle vérification portant sur une période déjà contrôlée, y compris sur une année complète et même lorsque cette période était déjà clôturée lors du premier contrôle, dès lors que le délai de reprise n'est pas expiré

 

La question principale soulevée par cet arrêt concerne les limites du principe d'interdiction des doubles vérifications de comptabilité inscrit à l'article L. 51 du LPF. Ce principe, vise à protéger le contribuable contre des contrôles répétés portant sur les mêmes périodes et les mêmes impôts, garantissant ainsi une forme de sécurité juridique.

 

La doctrine BOFIP précise :

Conformément à l'article L. 51 du LPF, lorsque l'examen de comptabilité ou une vérification de comptabilité pour un impôt, taxe ou un groupe d'impôts ou taxes est achevé pour une période déterminée, l'administration ne peut pas procéder à un nouvel examen de comptabilité ou une nouvelle vérification de comptabilité de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période. À défaut, la seconde procédure serait irrégulière.

Toutefois, l'administration est en droit de procéder successivement pour une même période à examen de comptabilité en matière d'impôt sur les sociétés par exemple, puis un autre ou une vérification de comptabilité en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et inversement.

BOI-CF-PGR-20-40

 

Toutefois, cette interdiction connaît des exceptions expressément prévues par le législateur. L'une d'elles, en matière de TVA, est énoncée à l'article L. 51-2° du LPF, qui renvoie aux cas prévus à l'article L. 176 du même livre qui définit le délai de reprise de l'administration en matière de TVA, fixé à trois ans à compter de l'année au cours de laquelle la taxe est devenue exigible.

Rappelons qu'en début d'année la Haute juridiction a rendu une décision concernant l'interdiction des doubles vérifications de comptabilité. Le Conseil d'État avait à trancher un litige concernant une société avait fait l'objet simultanément d'une vérification de comptabilité et d'un contrôle sur pièces pour l'exercice 2014, aboutissant à des rectifications distinctes. Après avoir conclu une transaction suite à la vérification, l'administration a maintenu les rectifications issues du contrôle sur pièces. Le Conseil d'État a cassé l'arrêt de la CAA de Paris qui avait déchargé la société au nom d'un prétendu "principe de loyauté". Il affirme qu'une transaction fiscale ne fait pas obstacle à des rectifications parallèles sur des chefs distincts, et que l'article L.51 du LPF interdit seulement une nouvelle vérification de comptabilité, mais pas un contrôle sur pièces simultané (Conseil d'État du 5 mai 2024, n°470616)

 

Rappel des faits 

La SCI D, exerçant une activité de location de logements, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité successives selon la procédure d'opposition à contrôle fiscal. La première vérification, menée en 2013, portait sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, et avait été étendue au 31 décembre 2012 pour la TVA. La seconde vérification, conduite en 2014, concernait l'exercice clos en 2012 pour l'impôt sur les sociétés et la TVA.

 

À l'issue de ces contrôles, l'administration fiscale a notifié à la société des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés pour les exercices 2010 à 2012, de TVA pour l'année 2012, et lui a infligé une amende prévue à l'article 1737 du CGI au titre de l'année 2012.

 

La SCI D a contesté ces rectifications devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui, par jugement du 5 juillet 2022, lui a accordé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, mais a rejeté sa demande de décharge des rappels de TVA et de l'amende.

 

C'est ce rejet partiel que la société a contesté devant la Cour administrative d'appel de Versailles.

  • Concernant la régularité de la procédure, la SCI D soutient que l'administration a méconnu la prohibition des doubles vérifications prévue à l'article L. 51 du LPF en renouvelant la vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2012 en matière de TVA. Selon elle, l'exception prévue à l'article L. 176 du LPF ne viserait que le renouvellement des contrôles sur une fraction de période d'imposition, et non sur l'entièreté d'une année d'imposition. Elle invoque également la doctrine administrative publiée au BOFiP sous la référence BOI-CF-PGR-10-30 n°70, qui prévoirait que l'administration ne peut opérer une double vérification que sur la fraction de l'exercice non clôturé lors de la première vérification.
  • Concernant l'amende de l'article 1737 du CGI, la société conteste sa légitimité en arguant que l'administration n'apporte pas la preuve du bien-fondé de cette sanction en l'absence des factures litigieuses, et que le montant de l'amende n'est pas cohérent avec le montant des factures allégué.

 

La Cour administrative d'appel de Versailles vient de rejetter rejeté la requête de la SCI D

 

  • Sur la régularité de la procédure d'imposition :

La Cour a interprété les dispositions des articles L. 51 et L. 176 du LPF comme permettant à l'administration de comprendre dans une nouvelle vérification de comptabilité une fraction de période d'imposition à la TVA ayant déjà fait l'objet d'une vérification, dès lors que cette fraction se trouve incluse dans un exercice situé à l'intérieur du délai de répétition prévu en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés.

La Cour précise qu'aucune disposition ne fait obstacle à ce que ce contrôle porte sur l'année entière ou sur une période déjà clôturée lors de la première vérification. Elle écarte également l'invocation par la société de la doctrine administrative, considérant que les énonciations du BOFiP concernées ne contiennent aucune interprétation de la loi fiscale mais sont uniquement relatives aux règles régissant la procédure d'imposition.

  • Sur l'amende de l'article 1737 du CGI

La Cour a considéré que l'administration avait apporté la preuve qui lui incombait du bien-fondé de cette sanction.

 

L'interprétation des exceptions au principe de non-renouvellement des vérifications de comptabilité en matière de TVA :

  • La Cour adopte une lecture favorable à l'administration fiscale en considérant que l'exception prévue à l'article L. 176 du LPF permet une nouvelle vérification portant sur une période déjà contrôlée, y compris sur une année complète et même lorsque cette période était déjà clôturée lors du premier contrôle, dès lors que le délai de reprise n'est pas expiré. 

 

Publié le lundi 5 mai 2025 par La rédaction

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