La juridiction administrative vient d’appliquer la dispense de TVA de l’article 257 bis du CGI lors de la vente d’un immeuble inscrit en stock et libre de location.
Conformément à l’interprétation des dispositions de l’article 5, paragraphe 8 de la sixième directive, repris au premier alinéa de l’article 19 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006, qui résulte de l’arrêt Zita Modes , la dispense de TVA prévue par l’article 257 bis du CGI lors de la transmission à titre onéreux ou à titre gratuit, ou sous forme d’apport à une société, d’une universalité totale ou partielle de biens s’applique à tout transfert d’un fonds de commerce ou d’une partie autonome d’une entreprise dès lors que le bénéficiaire du transfert a pour intention d’exploiter le fonds de commerce ou la partie d’entreprise ainsi transmis et non simplement de liquider immédiatement l’activité concernée.
Rappel des faits :
Le 11 octobre 2020, la SARL BCR, qui exerce une activité de marchand de biens et de négociation, gestion et administration d’immeubles, a acquis un TAB sur lequel elle a fait construire deux bâtiments A et B.
Ces bâtiments ont été achevés le 3 février 2006. La société a déduit la TVA relative à cette opération immobilière.
Par deux contrats en date des 1er août 2007 et 25 janvier 2008, elle a donné en location ces bâtiments, tous deux à usage d’entrepôt et de bureaux, respectivement à la SARL PA et à la région Rhône-Alpes. Le 26 juin 2013 elle a vendu le bâtiment B ainsi que des parkings, à la SCI P et le 13 février 2014 le bâtiment A et des parkings, à la SCI I.
A l’issue de la vérification de comptabilité dont la société a fait l’objet, par une proposition de rectification du 15 décembre 2015, l’administration a estimé, d’une part, que la SARL BCR aurait dû, en application de l’article 207-III-1-1° de l’annexe II au CGI, régulariser par vingtième, lors des cessions des bâtiments A et B, la taxe déduite en amont et afférente à l’opération de construction et, d’autre part, que la TVA grevant les dépenses engagées en vue de commercialiser le bâtiment A, directement et exclusivement affectées à l’opération de cession, ne pouvait ouvrir droit à déduction.
La SARL BCR a demandé au TA de Lyon de prononcer la décharge des rappels de TVA mis à sa charge. Par un jugement n° 1703950 du 5 octobre 2018, le TA de Lyon a fait droit à sa demande.
Le ministre de l’action et des comptes publics a relevé appel de ce jugement.
La Cour vient de rejeter l’appel du Ministre
Elle rappelle :
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que la SARL BCR utilisait les immeubles A et B dont elle était propriétaire pour exercer une activité de location
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que la SARL BCR a cédé ces biens immobiliers respectivement à la SCI I et à la SCI P en vue de poursuivre une telle activité de location.
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que l’intention des cessionnaires de poursuivre l’activité de location ressort des mentions de l’acte de vente du 26 juin 2013 pour le bâtiment B, et, en ce qui concerne le bâtiment A des faits exposés par la SARL BCR et non contestés par l’administration selon lesquels le jour de la cession, soit le 13 février 2014, un nouveau bail a été signé par le cessionnaire avec la société AMG qui a immédiatement donné en sous-location le bâtiment à la société PA qui est ainsi demeurée sans discontinuité dans les locaux.
Ces contrats de cession avaient ainsi notamment pour objet de permettre la transmission du cédant aux cessionnaires de l’exploitation des locaux en litige et devait, par conséquent, être regardés chacun comme procédant au transfert d’une partie autonome de l’entreprise au sens de l’article 257 bis du code général des impôts permettant la poursuite d’une activité économique.
… et alors même que la SARL Bati Conseil Rénovation n’a constaté aucune livraison à soi-même des immeubles litigieux qu’elle a construits, qu’elle a inscrit ces biens en stock et que le bâtiment A a été vendu libre de location, la cession de ces immeubles doit être regardée comme s’inscrivant dans le cadre d’une transmission à titre onéreux d’une universalité de biens au sens de l’article 257 bis du code général des impôts, dispensée de taxe sur la valeur ajoutée, et non ainsi que le prétend l’administration comme la simple vente de biens réalisée dans le cadre de l’activité de négociant de cette société.
Enfin, s’il résulte des dispositions de l’article 257 bis du code général des impôts que la transmission d’une universalité de biens n’est pas une opération taxée ouvrant droit, à ce titre, à déduction, les dépenses exposées par le cédant pour les services acquis afin de réaliser cette transmission font partie des frais généraux de cet assujetti et entretiennent donc en principe un lien direct et immédiat avec l’ensemble de l’activité économique dudit assujetti. Ainsi, la SARL Bati Conseil Rénovation pouvait déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les dépenses engagées en vue de commercialiser le bâtiment A qui faisaient partie des frais généraux de la société et entretenaient un lien direct et immédiat avec l’ensemble de son activité économique.
Pour la Cour
Pour la Cour, les cessions en litige entraient dans le champ d’application des dispositions de l’article 257 bis du CGI.