La négation de toute fiscalité adaptée à la raison d’entreprendre

01/10/2012 Par France Invest
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es professionnels français du Capital Investissement lancent un cri d’alarme suite au train de mesures de taxation des investissements proposé dans le projet de Loi de Finances 2013.

Au motif de dissuader les plus‐values spéculatives, il frappe inconsidérément et sans discernement les investissements de moyen et long terme, et dissuade toute prise de risque entrepreneuriale.

1. La proposition de taxation à plus de 60% des plus‐values réalisées par ceux, chefs d’entreprises ou actionnaires les accompagnant, qui auront réussi leur projet d’entreprise et surmonté les risques de l’investissement en actions, est par son amplitude une disposition punitive sans équivalent dans les pays comparables.

A titre d’exemple , le chef d’entreprise qui cède sa société pour un montant de 10 millions € aura typiquement construit une entreprise employant des centaines de salariés, supporté annuellement un impôt des sociétés d’un demi‐million d’euros et payé des millions d’euros de charges sociales. Le projet du gouvernement est de taxer à plus de 64% la plus‐value correspondante si elle survient avant 2015, et à plus de 60% si elle survient avant 2019.

A titre de comparaison, la France taxera en moyenne deux fois plus les plus‐values que ses partenaires. Aucun Etat en dehors de la France n’atteint un tel niveau de taxation sur ce type de revenu qui, par sa nature, reste aléatoire et peut se traduire par une perte. C’est la négation de toute fiscalité adaptée à la raison d’entreprendre.

« On ne peut pas se désoler du retard grandissant pris par la France dans la création d’entreprises innovantes et la construction d’ETI dynamiques et exportatrices, et dans le même temps réduire encore plus l’alimentation par les particuliers français des fonds qui soutiennent ces entreprises, dissuader les investisseurs étrangers d’investir en France par des dispositions aberrantes au regard de ce que font tous les pays développés, et enfin prendre des mesures punitives contre les professionnels qui s’emploient à accompagner ces entreprises de croissance. Notre profession soutient plus de 5000 entreprises en France, rassemblant 9% de l’emploi salarié ; elle leur apporte, en plus de fonds propres bien utiles, l’expertise de professionnels de la création et de l’accélération de la croissance d’entreprises. Ce métier très spécifique, déjà frappé par la crise, s’effondrera en France si ces mesures sont effectives. » déclare Louis Godron, Président de l’AFIC .

Si chacun comprend la nécessité d’efforts collectifs, un niveau de prélèvement aussi élevé sur le produit d’un investissement long et risqué dissuadera la prise de risque et l’esprit d’entreprise .

D’ailleurs, si l’Etat venait prélever plus de 60% de la plus‐value de celui qui a réussi, viendra t‐on compenser à plus de 60% la perte de celui qui a vu son investissement emporté par la crise et les difficultés ?

Sous l’apparence de vouloir harmoniser la fiscalité des revenus du capital et des revenus du travail, les nouvelles règles infligeraient en fait une double taxation des revenus générés dans les entreprises par le cumul de l’impôt sur les sociétés à 33% et du projet d’impôt sur les plus‐values (ou les dividendes) à plus de 60%.

Il faut avoir conscience que la reprise de la croissance et de l’emploi ne pourra provenir que de milliers de décisions individuelles de chefs d’entreprise ayant suffisamment confiance dans l’avenir et le soutien de leur pays pour s’engager dans de nouveaux risques.

Or depuis 5 ans les entrepreneurs traversent une crise usante, et subissent depuis des mois critiques et témoignages de défiance. Cette taxation exorbitante du produit éventuel de leur prise de risque consacrera la rupture de la France avec son tissu entrepreneurial , minera ce qui reste de la confiance des entrepreneurs, et aggravera la crise de l’emploi dans notre pays.

Cette proposition très néfaste pour notre économie trouve son paroxysme dans des mesures spécifiquement ciblées contre la profession des investisseurs pour la croissance.

2. Le projet de loi prévoit l’alignement sur les traitements et salaires de la taxation du co-investissement des professionnels au succès des entreprises qu’ils accompagnent (« carried interest »).

 

Pourtant il n’y a rien de comparable entre un traitement ou salaire perçu en fin de mois et le risque que portent ces professionnels, dans un co‐investissement au capital de leurs fonds, exigé par les institutions qui dotent ces fonds comme gage de la qualité de gestion à long terme.

Les revenus de ces co‐investissements sont des plus-values conditionnées à la performance, assorties d’une prise de risque très importante en proportion des revenus des personnes concernées et d’un blocage des fonds pour une durée de 5 à 10 ans, caractéristiques d’un investissement à risque de long terme.

Taxer de manière identique ce co‐investissement et les salaires est une aberration qui reviendrait à décourager ceux qui, au quotidien, prennent eux aussi le risque d’entreprendre pour soutenir les entreprises dans leur croissance et qui, y compris en période de crise économique, ont continué à injecter de l’argent frais dans les start‐up, les PME et les ETI quand les investisseurs institutionnels et la Bourse se repliaient.

Cette singularité française sera de plus extrêmement pénalisante dans la compétition mondiale pour les meilleurs talents de l’investissement dans ces entreprises de croissance.

3. Toutes ces mesures contribuent de surcroît à donner aux yeux des investisseurs étrangers l’image dévastatrice d’un pays qui n’aime pas la réussite et le succès, et qui les frappe par une fiscalité confiscatoire.

 

Ces investisseurs, qui sont depuis la période électorale engagés dans un attentisme marqué, iront au vu de ces mesures investir ailleurs.

4. Enfin, l’AFIC avait noté que, jeudi 20 septembre, François Hollande s’était engagé devant un parterre d’entrepreneurs réunis à l’Elysée à ce que les dispositifs fiscaux favorisant l’investissement dans les PME soient maintenuspendant son quinquennat.

La parole présidentielle est déjà démentie dans le projet de Loi tel que présenté en Conseil des Ministres vendredi 28 septembre, qui prévoit un plafonnement à 10.000 € du soutien fiscal à l’investissement dans les PME, les FIP et les FCPI [1] .

« On ne peut pas se désoler du retard grandissant pris par la France dans la création d’entreprises innovantes et la construction d’ETI dynamiques et exportatrices, et dans le même temps réduire encore plus l’alimentation par les particuliers français des fonds qui soutiennent ces entreprises, dissuader les investisseurs étrangers d’investir en France par des dispositions aberrantes au regard de ce que font tous les pays développés, et enfin prendre des mesures punitives contre les professionnels qui s’emploient à accompagner ces entreprises de croissance. Notre profession soutient plus de 5000 entreprises en France, rassemblant 9% de l’emploi salarié ; elle leur apporte, en plus de fonds propres bien utiles, l’expertise de professionnels de la création et de l’accélération de la croissance d’entreprises. Ce métier très spécifique, déjà frappé par la crise, s’effondrera en France si ces mesures sont effectives. » déclare Louis Godron, Président de l’AFIC .

 

 

Tribune de l'AFIC du 30 septembre 2012

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