Plus-value professionnelle : la conservation de l’immeuble d’exploitation ne fait pas échec à l’exonération
Le Conseil d’Etat vient de rappeler qu’il ne peut être fait échec à la mise en oeuvre de l’exonération de plus-value professionnelle prévue par l’article 238 quindecies du CGI du fait du non transfert des immeubles d’exploitations.
L’article 238 quindecies du CGI exonère d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés, sous certaines conditions, les plus-values réalisées dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole lors de la transmission, à titre onéreux ou à titre gratuit, d’une entreprise individuelle, d’une branche complète d’activité ou, par assimilation, de l’intégralité des droits ou parts de sociétés de personnes considérés comme des éléments d’actif professionnels.
Lorsque les conditions posées par cet article sont satisfaites, l’exonération est totale lorsque la valeur des éléments transmis est inférieure à 300 000 € et partielle lorsque cette valeur est comprise entre 300 000 € et 500 000 €. Cette exonération ne s’applique pas, en règle générale, aux plus-values portant sur des actifs immobiliers ou des droits ou parts d’une société à prépondérance immobilière.
Rappel des faits
A l’issue d’une vérification de comptabilité de l’exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL non IS) B dont M. B était l’unique associé l’administration a remis en cause du bénéfice du régime d’exonération de l’article 238 quindecies du CGI dont M. B s’était prévalu au titre des plus-values constatées lors de la cession à son fils du matériel agricole de l’EARL.
Le Tribunal Administratif de Rennes (jugement du 19 mars 2015) et la Cour Administrative d’Appel de Nantes (Arrêt du 24 novembre 2016) ayant rejeté la demande de M. B tendant à la décharge des impositions issues du redressement, le contribuable s’est pourvu en cassation.
Le Conseil d’Etat vient de rappeler qu’une plus-value n’est exonérée, en application de l’article 238 quindecies, que si la branche d’activité en cause est susceptible de faire l’objet d’une exploitation autonome chez le cédant comme chez le cessionnaire et sous réserve que la transmission de cette branche d’activité opère un transfert complet des éléments essentiels de cette activité tels qu’ils existaient dans le patrimoine du cédant et dans des conditions permettant au cessionnaire de disposer durablement de tous ces éléments.
« A cet égard, l’absence d’apport en pleine propriété d’immeubles ne fait pas obstacle à ce que le transfert soit regardé comme complet dès lors qu’il garantit à son bénéficiaire, pour une durée suffisante au regard de la nature de l’activité transmise, le libre usage de ces immeubles aux fins de l’exploitation de cette activité. »
Pour refuser l’exonération, la cour administrative d’appel s’était fondée sur le fait que les bâtiments d’exploitation de l’entreprise cédante, à savoir les serres, le local de chaufferie, le local de stockage et un hangar, avaient été repris dans le patrimoine privé de M. et Mme B et non transmis en pleine propriété à l’EARL K du fils.
La Cour avait même écarté l’argument selon lequel ces bâtiments avaient été loués à son fils, exploitant et associé unique de l’EARL K, qui les avait lui-même mis à la disposition de celle-ci, sans rechercher si de telles modalités garantissaient, en l’espèce, à l’EARL K, pour une durée suffisante au regard de la nature de l’activité transmise, le libre usage de ces immeubles aux fins de l’exploitation de cette activité.
Le Conseil d’Etat censure la décision de la CAA de Nantes estimant que son arrêt était entaché d’une erreur de droit.
Cette décision va dans le droit fil de la doctrine BOFIP-Impôt qui admet « que la pleine propriété des immeubles et des marques nécessaires à l’exploitation soient conservés par le cédant dès lors que le cessionnaire s’en voit garantir l’usage dans des conditions suffisamment pérennes (BOI-IS-FUS-20-20 au I-B-2-a-1° § 180 à 200). » BOI-BIC-PVMV-40-20-50-20140325, n°140