Réduction de l’avantage fiscal ISF-PME : la faute aux intermédiaires financiers ?
Selon le quotidien économique Les Echos, le gouvernement Ayrault aurait pour projet de réduire de moitié l’avantage fiscal du dispositif ISF-PME... La réduction ISF PME passerait ainsi de 50 % à 25 %.... Aussi contestable soit-elle, cette mesure, teintée d’anti-sarkozysme, peut également s’expliquer par une diminution de l’efficacité du dispositif liée à la captation de l’avantage fiscal par les intermédiaires financiers.
Le taux de cette réduction d’ISF est fixé, depuis le 1er janvier 2011 à 50% des versements effectués au titre de souscriptions au capital de PME ou de titres participatifs de SCOP, en numéraire ou en nature, dans la limite de 45 000 € par an (CGI, art. 885-0 V bis, I et II) et à 50 % des versements réalisés au titre de souscriptions en numéraire dans des parts de FIP éligibles, dans la limite de 18 000 € par an (CGI, art. 885-0 V bis, III).
L’information dévoilée par Les Echos vendredi dernier a suscité un certain nombre de critiques d’autant plus justifiables que le Président de la République avait indiqué en avril dernier, lors d’une intervention devant la CGPME, qu’il maintiendrait les déductions d’ISF pour les investissements qui sont faits dans les PME.
Certes, en pratique il serait maintenu mais réduit de moitié ! Or comme l’a souligné France Biotech le 21 mai dernier : « toute diminution de ce taux de 50% ou tout plafonnement du montant d’investissement réduirait drastiquement le financement des PME ».
Si le principe d’un soutien public au renforcement en fonds propres des PME doit demeurer, il ne faut pas occulter, surtout en période de "non croissance", que cette dépense fiscale à un coût pour l’Etat.
Au titre de l’ISF 2010, 93 358 redevables ont mentionné sur leur déclaration au moins un des investissements dans les PME inscrits dans la loi TEPA.
Le nombre de réductions ainsi que les montants correspondants se répartissent comme suit :
Investissement | Case de la déclaration | Nombre de réductions déclarées | Montant total de la réduction déclarée (Millions d’€) |
---|---|---|---|
Directs dans une société | MU | 45225 | 563 |
Par sociétés interposées | MW | 12362 | 150 |
Par le biais de fonds d’investissement de proximité (FIP) | MY | 19755 | 66 |
Par le biais de fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) et fonds communs de placement à risques (FCPR) | NB | 18210 | 61 |
Total | 95 552 | 840 |
(Source : Réponse ministérielle Estrosi JOAN du 23 août 2011, question °96479)
Si cet avantage fiscal « qui ne connait pas d’équivalent à l’étranger » favorise l’investissement dans le capital des PME « (12,7 Mds € de fonds levés en 2008 par les fonds d’investissement, plaçant la France juste derrière le Royaume‐Uni au niveau européen) » il n’est pas exempt de critiques comme le souligne le rapport Guillaume.
En effet, outre le trop grand nombre et la complexité des véhicules fiscaux, le rapport pointe du doigt le détournement de la dépense fiscale par les intermédiaires financiers : « une partie des flux d’investissement est captée par les sociétés de gestion et les intermédiaires financiers, du fait de frais de gestion élevés, au détriment des PME et des souscripteurs »
La captation d’une partie significative de l’avantage fiscal est ainsi de nature à grever l’efficacité du dispositif de soutien au financement des entreprises.
Cette critique n’est pas récente.L’IGS avait en 2009 été saisie d’une mission visant à étudier les frais et commissions prélevés sur les produits d’investissement dans les PME ouvrant droit aux avantages fiscaux ISF-PME et IR-PME (Rapport n° 2009-M-066-03, d’octobre 2009).
Il ne s’agit pas ici de condamner les intermédiaires financiers et les sociétés de gestion mais de rappeler qu’ils participent aussi, indirectement, à rendre une mesure fiscale, pourtant indispensable à notre économie, inefficace.
Or, une dépense fiscale qui ne remplit pas ses objectifs (score 0) est susceptible de faire l’objet de mesures d’économies.
Soulignons que la Cour des Comptes, qui est favorable à un maintien du dispositif ISF-PME, propose, à titre de mesure "anti-captation" « que le contribuable puisse choisir d’investir par l’intermédiaire, par exemple, de CDC Entreprises. Une solution alternative proposée par Oséo345 permet aux entreprises et aux investisseurs individuels de se rencontrer sur une plateforme internet afin de faciliter l’investissement direct des particuliers dans le capital des PME » (Rapport de la Cour des comptes : « L’Etat et le financement de l’économie » – juillet 2012)
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